Livre d’or

Zoltán Zsakó Bas reliefs de mémoire

Ici, des figures rayonnantes de nudité évoluent dans un espace vide comme un ciel incréé. L’abondance est convoquée ; elle sera entièrement dévolue aux corps, prétextes ultimes, nécessaires et suffisants. Abondance face au vide : tout s’offre aux fantasmes et aux fantaisies puisqu’aucun contexte concret ne leur oppose sa fâcheuse réalité.
Chez Zsakó, les corps sont beaux. Mais pour qu’aucun ennui ne s’attache à leur perfection, on les mâtine de monstruosité : la corne d’abondance résonne d’abondances. Bacchus, Eros, triomphent ; ils dévoilent à la grande faucheuse –dont la présence est toujours latente- un dynamisme heureusement fessu, une ivresse matériellement cristallisée.
Zsakó, avec humour –un humour qui sait utiliser la référence classique-est donc – à son insu peut-être, au nôtre sûrement-un moraliste galopant. Il a de l’art une notion pure et durable ; il a sur l’homme des espérances sans concessions. Son œuvre ferait penser que les formes vivent une éternité –ou une durée – recommencée.
Entre la lame du sabre et la douceur, entre la cosmogonie et la mythologie, il nous rappelle les magnificences du corps et des ressourçantes vanités. Zsakó caresse un temps qu’argente le palladium recouvrant ses intarissables surfaces.

Frédéric AMBLAR

Autant que fer se peut.

S’il les avait connues, Charles Trenet eut certainement accueilli les sculptures-outils de Zoltán Zsakó dans son Jardin extraordinaire Là où les canards parlent anglais et les statuts s’en vont danser sur le gazon…

Celles de Zoltán font mieux encore ! Ce sont des jeux de mots métalliques, des métaphores de fer dans lesquels le coq-poulie, l’oiseau-serpe, la sauterelle-clef anglaise ou le chien-cric constituent une nouvelle race de mutants zoomorphes qui nous parlent.

Car, le saviez-vous ? Il existe des tenailles callipyges, des tournevis priapiques qui, du boulon enjôleur au sourire du sécateur, constituent un univers où le sculpteur marie avec bonheur et fantaisie le vétérinaire et le plombier.

Certes, d’autres avant lui : Picasso ou César pour ne citer que ceux-là, ont aussi pratiqué cet art de la récupération mais jamais me semble-t-il avec un tel évident plaisir, allié à une justesse de la trouvaille formelle. Zoltan, dans cette œuvre, dépassant la simple anecdote, devient une sorte de fabuliste où le chalumeau et la soudure ont remplacé la plume et les alexandrins.
Il capte parfaitement ce qu’un objet usuel, derrière sa banalité quotidienne, recèle de poésie et de mystère insoupçonnés.
Car l’artiste est un passeur de rêves et c’est à son talent que revient le privilège de nous les dévoiler.

Gérard Landrot

« C’est beau et louche à la fois « .F.B.

 » Un univers peuplé de personnages élancés dont la nudité dévoile la fragilité, d’hommes et de femmes vivant en déconcertante symbiose avec une végétation filiforme et une kyrielle d’animaux réels ou imaginaires ».
Eva-Frédérique DAP

“ Le Kama Sutra vu par Bosch en lamé d’or ”
J.

La curieuse perfection de ses fantaisies cérébrales

Exemplaire par sa technique, exemplaire par sa science de la composition, par l’intelligence de ses propos, par la finesse de son exécution, par l’extraordinaire richesse de son vocabulaire plastique, grand connaisseur de toutes anatomies en bon état, sachant les interpréter par des dessins superbes, Zoltán Zsakó réussi à humaniser, à actualiser les situations les plus absurdes, celles des dieux grecs, des saints chrétiens, des zoos en liberté par un humour charmant et léger, non exempt de profondeur et même de moralité narquoise.

C’est d’une main complètement maîtrisée qu’il cisèle le plâtre et évide, comme en négatif sa surface pour y laisser un condensé de ses fantasmes et de sa culture, et l’empreinte, ensuite, révèle par sa lumière accrochée, à notre surprise, la merveilleuse intransigeance esthétique de ses visions, la curieuse perfection de ses fantaisies cérébrales, comme travaillées au scalpel, nous dirions, aujourd’hui au laser !

Le monde animalier de Zoltán vit en osmose avec les couples précédents, qu’ils ont apprivoisés, bestiaire magnifique d’ingéniosité et de délicatesse d’exécution, qui se ment par enchevêtrement savant, dans des guirlandes poilues et herbues et dans un équilibre arbitraire mais infaillible aux résultats toujours émouvants.

Dans certains endroits, des natures mortes faites de haches, des couteaux de cuisine, des coquillages, des bouteilles de vin omniprésentes, ligotées aux êtres sont là pour les accompagner pour un voyage éthylique ver la postérité.
Claude Chanot

L’art de Zoltán Zsakó est inclassable.

Sculpture donc puisque ses œuvres sont en relief, dessin aussi par la finesse du trait, mais c’est surtout une écriture. Écriture qui aurait oublié les mots pour céder directement la place à des images reliées entre elles par des paraphes exubérants, ultimes vestiges d’une langue à jamais disparue.

Son œuvre est une fantaisie totale puisqu’elle est un répertoire dévoilé de fantasmes. Jérôme Bosch revisité par Dali, mais, à l’inverse de ceux-là, Zoltán ne croit pas à un Dieu vengeur. Il n’admet ni l’enfer, ni la faute originelle. Tout est Paradis. Même lorsqu’il représente le Mal ou la violence, ses élégantes créatures s’étripent et se décapitent allègrement, certaines de bénéficier d’une inaltérable rédemption.

De ce fait, il émane de ses créations un extraordinaire
sentiment de liberté. Liberté du style appliquée à un monde imaginaire d’où toute contrainte est abolie. L’humour constant de cette représentation, parfois soulignée par un titre incongru, accentue sa vision édénique. On se prend à penser que cette vie d’éternelle jouvence et de symbiose avec les bêtes existe quelque part dans une sorte de liquide amniotique universel, un girond cosmique et généreux où, seul, Zoltán a su pénétrer.

Gérard Landrot